Thierry JacquesPour{multithumb} le président du MOC, la coalition en gestation ne pourra pas prendre de mesures cohérentes. Il plaide pour une autre alliance, de centre-gauche.

 

Entretien

(Photo: La Libre)

 

 

 

Alors que la fin du congé de carnaval signifiera le début des grandes manoeuvres politiques en vue de confectionner un budget pour l'Etat et un programme socio-économique pour le gouvernement définitif, le Mouvement ouvrier chrétien (MOC) fait entendre sa voix. Son président, Thierry Jacques estime que la coalition telle qu'elle est en train de se mettre en place conduira à la paralysie, et plaide pour une alliance des "progressistes".

 

Que pensez-vous de la situation politique ?

Même si on a un gouvernement intérimaire aujourd'hui, qui était censé répondre à l'urgence, la crise continue. C'est manifeste. La seule mesure d'urgence qui a été prise, c'est l'élargissement de l'accès au fonds mazout. Ce gouvernement doit maintenant faire son budget. On voit combien c'est difficile. Et en même temps, le carrousel de petites phrases a repris de plus belle. On a le sentiment que ce qui mobilise le monde politique, c'est d'abord l'institutionnel et la réforme de l'Etat. Pour moi, c'est tout à fait dramatique. On ne s'attaque pas aux vrais problèmes des gens et on ne leur donne pas de perspectives pour l'avenir sur des questions cruciales telles que le vieillissement de la population et le défi climatique. Or les gens ont besoin de confiance et d'espoir. Aujourd'hui, ils ne croient plus.

 

Tout le monde dit vouloir donner de la confiance et de l'espoir...

Oui. Encore faut-il y arriver. Et nous, au MOC, nous sommes convaincus qu'on n'y arrivera pas avec l'alliance actuelle. On voit bien que les réformes proposées par les uns et les autres sont fondamentalement opposées. Les désaccords sont profonds entre les progressistes et les tenants du libéralisme.

 

Vous voulez dire : entre les deux partis libéraux et les autres.

Exactement.

 

Quels désaccords ? Donnez des exemples.

Prenons la question fiscale. Va-t-on faire une nouvelle réforme fiscale comme l'ont déjà annoncé les libéraux ou va-t-on s'attaquer sérieusement à la pauvreté dans ce pays ? Cela ne suppose pas les mêmes mesures. Pour s'attaquer à la pauvreté, il faut un nouvel équilibre fiscal : diminuer l'impôt sur les revenus du travail, augmenter celui sur les revenus mobiliers et immobiliers. Il y a aussi la question des intérêts notionnels... Les intérêts notionnels, c'est un bel exemple de ce que peut faire une coalition contre-nature, pour reprendre l'expression de Laurette Onkelinx, où il n'y a pas de cohérence idéologique. Il y a eu un marché sous la précédente législature : les libéraux ont eu les intérêts notionnels et les socialistes, des promesses de revalorisation des allocations sociales. Ce genre de donnant donnant est possible quand il y a de l'argent. Pas quand les caisses de l'Etat sont vides comme maintenant. Aujourd'hui, les socialistes découvrent que les intérêts notionnels sont, sur le plan financier, catastrophiques. Didier Reynders disait à l'époque que cela coûterait 500 millions d'euros. On va sans doute atteindre 2,5 milliards.

 

D'autres exemples ?

Il y a aussi la question des sans-papiers. C'est un problème auquel il faut faire face dans l'intérêt de tout le monde. Mais on voit bien qu'avec les libéraux flamands, il n'est pas possible d'y apporter une réponse humaine et cohérente.

 

En clair, vous demandez l'instauration d'une coalition sans les libéraux. Est-ce réaliste ?

Une alliance entre les familles écologiste, socialiste et sociale-chrétienne/humaniste, c'est 86 sièges. Cinq de plus que l'orange bleue. Cela n'assure pas la majorité des deux tiers comme une tripartite classique vers laquelle, semble-t-il, on se dirige. Mais au moins, avec une telle formule, on ne court pas à la paralysie. Nous pensons que vouloir à tout prix une majorité des deux tiers par une tripartite classique va amener, sur le plan socio-économique, une paralysie du gouvernement. La réforme de l'Etat va passer avant tout le reste. On fera de l'institutionnel, pas du socio-économique. Ce n'est pas comme cela que l'on rendra confiance et espoir à la population.

 

On peut y échapper, à l'institutionnel ?

On a compris qu'il faudra des avancées sur ce plan-là. Mais cela ne peut pas prendre le pas sur tout le reste. Il faut des réponses socio-économiques cohérentes. Et pour avoir des réponses socio-économiques cohérentes, il faut une autre coalition que celle qui se met en place.

 

Ce n'est pas le souhait de l'électeur... Les socialistes ont été battus aux élections.

Les libéraux aussi ont perdu : le VLD est le parti qui a perdu le plus de voix, le MR a perdu un siège à la Chambre. Le MR a gagné en voix... Mais le VLD est celui qui a le plus perdu. On peut faire dire n'importe quoi à l'électeur. A ce compte, les écologistes, qui ont gagné le plus de voix en communauté française, et La liste Dedecker, doivent immanquablement se trouver au pouvoir. Et puis, à ce que je sache, les électeurs n'ont pas demandé une coalition tripartite non plus. C'est pourtant ce que certains prônent maintenant.

 

Non, mais la Flandre a demandé une réforme de l'Etat.

Mon homologue flamand, Jan Renders, ne cesse de dire que le CD & V a aussi gagné grâce à son programme socio-économique. Le vote en Flandre pour le CD & V est un vote pour la justice fiscale, la lutte contre la pauvreté, le renforcement de la sécurité sociale. Et ce n'est pas un programme de droite.

 

Mais qui doit former cette coalition? Côté francophone, c'est le président du MR qui a la main pour réunir les partenaires...

Il faut mettre les éléments sur la table et voir s'il y a la capacité de concilier les points de vue. On sera vite fixé. Si les partis se bagarrent tout de suite sur la réforme fiscale, on n'y arrivera pas avec cette coalition.

 

Le MOC a été bien servi dans le gouvernement intérimaire. Il y a Josly Piette, Inge Vervotte, Jo Vandeurzen. C'est un retour en grâce ?

Ce qui est vrai, c'est qu'il y a dans ce gouvernement des personnes dont nous pensons le plus grand bien. Mais ce n'est pas un retour en grâce.

 

On a quand même le sentiment que les liens entre le MOC et le CDH d'une part, et entre son pendant flamand et le CD & V de l'autre, s'étaient relâchés durant les années d'opposition et qu'ils se sont resserrés...

La situation est différente en Flandre et en communauté française. Nous, nous n'avons jamais perdu les contacts avec le CDH tout en maintenant notre volonté de rester pluraliste. En Flandre, c'est différent. Les relations du MOC flamand avec le CD & V ont été plus difficiles. Mais elles étaient plus importantes.

Vincent Rocour

www.lalibre.be/actu/belgique/article/400655/avec-les-liberaux-pas-de-coherence.html

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